La langue du coran
La version originale des manuscrits du coran constitué par le calife Othman, appelée le rasm(l’orthographe canonique) ne contient que trois voyelles longues : a, i, u, et ne fait pas la différence entre certaines consonnes, aujourd’hui différenciées par des points diacritiques. Cette écriture, nommée scriptio defectiva, est indéchiffrable, et ne peut servir que d’aide mémoire à ceux qui connaissent déjà le texte. Les points diacritiques pour distinguer certaines consonnes ont commencé à apparaître en arabe au tournant du VIIIe siècle sur l’ordre de Al-Hajjaj ben Yousef, gouverneur de l’Irak (694-714) pour le calife Abd al Malik ainsi que les schèmes (séquences) de voyelles s’insérant entre les 3 consonnes de la racine des mots pour en préciser la fonction et le sens. Chaque séquence de voyelles ayant un rôle bien précis, c’est le croisement d’une des milliers de racines et d’un des 3000 schèmes qui donne un sens.
Connaissant la bible et les évangiles, l’auteur judéo-nazaréen des premiers feuillets du coran utilise beaucoup de mots hébreux ou araméens que les traductions officielles actuelles n’ont pas reconnus, refusant toute lexicologie juive ou araméenne, et causant des ruptures de sens continuelles et même de nombreux passages incompréhensibles.
Le Coran regorge d’hébraïsmes, de noms, de mots et d’expressions hébraïques (reconnaissables aisément en dépit des innombrables erreurs dans leur retranscription en arabe). Les experts en araméen (dans sa variante syriaque) y ont trouvé également un vocabulaire étendu et une syntaxe qui sont indubitablement en langue araméenne, au point de conclure qu’il s’agit d’une langue composite arabo-hébreue-araméenne, artificielle et spécifique au Coran.
Voici ce qu’en disait au IXème siècle le chrétien arabe al Kindi dans sa lettre au musulman al Hasimi :
« Nous constatons que ton maître eut besoin d’utiliser, dans son livre, la langue des autres. Lui qui déclarait : « Nous avons révélé le Coran en arabe » (12 :2) il s’adressait à des Bédouins pur-sang, éloquents et orateurs, par des mots étrangers, comme istabraq, sundus, abârîq, namâriq et d’autres expressions semblables qui sont des termes persans. De même le terme de miskât est abyssin, signifiant lucarne. De nombreux termes semblables sont utilisés dans son livre.
Nous disons donc : Ou bien la langue arabe lui parut insuffisante, peu développée, ce qui l’obligea à recourir à des langues étrangères, ou bien il ignorait les termes arabes désignant ces choses.
Et si, comme tu le penses, ces termes lui furent communiqués de la part du Maître de l’univers, par l’intermédiaire de Gabriel, l’ange fidèle. Par conséquent l’insuffisance doit être attribuée soit à celui qui envoie soit au messager. Or si ces termes étaient de ton maître, l’insuffisance provien¬drait de lui, du fait qu’il ignorait les noms de ces choses en arabe, qu’il ne les avait pas appris, et de ce fait il ne put les exprimer. […]
Ainsi donc l’existence de mots étrangers dans ce livre amène à dire : Ou bien ton maître se sentit à l’étroit dans la langue arabe – et pourtant nous savons tous que notre langue arabe est la plus riche – ou bien ces mots furent introduits dans ce livre par d’autres, comme nous l’avons déjà mentionné en exposant l’histoire de la formation de ce livre et en montrant que de nombreuses mains le manipulèrent. […] »
David Belhassen constate que « Le Coran rassemble des passages du Pentateuque, du Livre de Josué, du livre des Psaumes, des Evangiles (y compris apocryphes), des bribes d’hagiographes bibliques, des réminiscences de littérature talmudique en araméen, et enfin des traditions « arabes » préislamiques revisitées et réinterprétées ». (voir notre page sur ces emprunts)
Le coran se dit inimitable, dans un arabe parfait. Le coran lance d’ailleurs aux mécréants ce défi, repris dans 4 sourates : « Si vous avez un doute sur ce que nous avons révélé à notre serviteur, tâchez donc de produire une sourate semblable et appelez vos témoins, (les idoles) que vous adorez en dehors d’Allah, si vous êtes véridiques ». (2 :23, 52:33-35, 11:13-14, 17:88)
On nous dit aujourd’hui sur les forums que le coran est inimitable sur le fond comme sur la forme, sa supériorité linguistique, son style, la clarté de son message, la force de ses arguments, la qualité de sa rhétorique et l’incapacité des hommes à produire quoi que ce soit de similaire et ce, jusqu’à la fin des temps, lui confèrent un caractère absolument unique et que c’est une preuve de son écriture par dieu. Ce défi est absurde car on pourrait l’utiliser pour Roméo et Juliette de Shakespeare et en déduire que c’est la parole de dieu, que Shakespeare était donc un prophète, et que Mohamed n’était pas le dernier prophète, et c’est d’autant plus absurde que l’histoire de la collecte des morceaux épars du coran par les califes explique qu’il y ait de nombreuses lacunes entre ces morceaux, que le traducteur masque comme il peut avec ou sans parenthèses. D’ailleurs les historiens et arabisants analysent ainsi la langue du coran :
Ibn Kaldoun, historien des premiers temps de l’islam, dit que « Aux débuts de l’islam, l’arabe n’était […] pas écrit convenablement, avec une grande précision et beaucoup d’élégance. Le résultat était plus que médiocre, car les arabes nomades étaient encore sauvages et les arts leur étaient étrangers. On le voit bien en observant ce qui s’est produit pour l’orthographe du coran. Les compagnons du prophète transcrivaient le texte à leur manière, qui n’était pas brillante: la plupart de leurs lettres étaient incorrectes. Leurs successeurs immédiats les recopièrent […]. On doit donc ne tenir aucun compte d’affirmations irréfléchies. Certains prétendent, en effet, que les compagnons du prophète étaient très bons scribes et qu’il doit y avoir une explication à toutes leurs fautes d’orthographe […]. Pensant qu’il est parfait de bien écrire, ces esprits zélés ne peuvent admettre l’imperfection chez les compagnons. Pour bien montrer qu’ils étaient impeccables, jusque dans leur orthographe, ils veulent, à toute force, justifier leurs erreurs dans ce domaine. Mais ils ont complètement tort. En effet, pour les compagnons du prophète, l’écriture n’avait rien à voir avec la perfection: il s’agit d’un art citadin, qui sert aux scribes à gagner leur vie. Or, la perfection artistique est toute relative: elle n’est pas la perfection en soi. L’inaptitude à l’exercice d’une technique n’affecte pas la foi ou les qualités d’une personne ». (Ibn-Khaldoun: Discours sur l’histoire universelle, vol. 2, p. 850-852)
Ali Dashti, auteur de 23 ans (http://webdivers.free.fr/ali-dashti-23-years-francais.php#LeCadre) explique que « Le Coran contient des phrases inachevées et pas entièrement intelligibles sans l’aide des commentaires; des mots étrangers, des mots arabes peu familiers, et des mots utilisés avec une autre signification que la normale; des inflexions d’adjectifs et de verbes sans observation des accords de genre et de nombre; des pronoms utilisés illogiquement et non grammaticalement, parfois sans aucun référent; et des prédicats qui dans les passages rimés sont souvent éloignés des sujets ».
Richard Bell et M Watt dans leur introduction au coran expliquent que « Outre les points déjà mentionnés — les rimes cachées, les phrases versifiées qui ne s’insèrent pas dans la trame du passage — ce sont des changements brusques de rime, la répétition d’un même mot pour la rime ou de vers dans des versets consécutifs, l’intrusion d’un sujet étranger dans un passage qui est par ailleurs homogène, le retour d’un même sujet dans des versets voisins, souvent avec répétition de mots ou de phrases, des ruptures dans la construction grammaticale qui soulèvent des difficultés exégétiques, des changements brusques de longueur des versets, des changements soudains de situation dramatique, avec passage d’un pronom singulier à un pronom pluriel ou avec passage de la seconde à la troisième personne et ainsi de suite, la juxtaposition de déclarations apparemment contraires, la juxtaposition d’événements ayant des dates différentes, la répétition de phrases déjà énoncées dans des vers précédents. Dans beaucoup de cas, une histoire a plusieurs suites possibles qui sont placées l’une derrière l’autre. Elles se distinguent entre elles par une rupture de sens et de construction grammaticale. La liaison n’est pas avec ce qui précède immédiatement, mais avec ce qui se trouve un peu plus en arrière ».
Sami Aldeeb, auteur d’une édition du coran dans l’ordre chronologique et de sa traduction précise que « Les erreurs du Coran sont de deux genres:
Erreurs grammaticales: la grammaire arabe a été établie sur la base du coran et d’autres textes, mais le texte du coran ne respecte pas toujours ces règles et comporte des incohérences. Ces incohérences peuvent concerner les verbes, les mots et les pronoms. On parle en français d’énallage. Voir cet article http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nallage. On peut y ajouter les erreurs d’orthographe (notamment des mots écrits de différentes manières dans le coran)
Erreurs stylistiques: cela comprend les erreurs suivantes: inversion des éléments d’un passage donnant un contre-sens, phrases lacunaires dont des éléments manquent donnant lieu à des interprétations contradictoires pour combler ces lacunes, absence de liens entre un passage et les passages suivants et précédents, introduction d’éléments qui n’ont aucun lien avec le texte (comme un cheveu dans la soupe), utilisation d’un terme non approprié, répétitions inutiles, etc..
Je n’entre pas ici dans les raisons de ces erreurs grammaticales ou stylistiques. J’estime le nombre des erreurs grammaticales et stylistiques à environ 2500 erreurs, et le nombre des lacunes à environ 700 lacunes (donc un sur dix des versets du coran au moins est lacunaire). »
Le Coran est issu d’une prédication basée sur les textes sacrés juifs, en hébreu, faite en hébreu ou en araméen par un rabbin dissident ou un judéo-chrétien, nazaréen. Il en a sans doute fait lui-même la transcription en arabe ancien, sans les voyelles ni les accents diacritiques et donc avec beaucoup de mots ambigus qu’un scribe arabe connaissant très mal l’hébreu a ultérieurement interprété lorsqu’il a rajouté ces voyelles et accents. (voir http://davidbelhassen.blogspot.fr/2017/01/la-langue-du-coran.html
Qui pousse les traducteurs à masquer ces lacunes du Coran ? Et qui les autorise à ajouter des mots (avec ou sans parenthèses) qui ne s’y trouvent pas ? Ils « toilettent » le texte, le « maquillent » et cherchent à lui octroyer une perfection linguistique et une qualité littéraire comme s’il s’était agi de l’œuvre d’un écrivain de renom.
On doit reconnaitre la difficulté de la tâche des traducteurs, même arabes, qui, à partir de ce texte en arabe ancien, doivent présenter honnêtement un texte compréhensible, une interprétation. La traduction en arabe moderne de 1923 est elle-même une interprétation. Remi brague précise ce point capital concernant les traductions du coran : « Nous croyons disposer aujourd’hui de bien des traductions du Coran. Reste à savoir si c’est bien le Coran que l’on lit à travers ces traductions. Et déjà. si c’est bien le Coran que les traducteurs ont traduit. Outre les difficultés que doit affronter tout traducteur, il en est en effet une spécifique, préalable. et la plupart du temps invisible. C’est, pour le dire en un mot, de ne traduire que le Coran. Et non pas l’interprétation que la tradition des commentateurs médiévaux a donnée de certains mots ou passages difficiles, et ils ne manquent pas. De ce point de vue. il est d’ailleurs ironique de constater que le musulman arabophone qui lit « son » Coran. qui l’écoute réciter, ou qui le récite lui-mème. est exactement logé à la même enseigne que le philologue occidental. On croit lire, écouter, traduire le Coran. En réalité, on ne fait que répéter les interprétations des commentateurs qui à partir de la lin du IXème siècle. en particulier à partir de Tabari en 923 ont cherché tout simplement à venir à bout du tissu d’obscurités qui constitue le « Livre clair. » C’est déjà un grand mérite. de la part d’un traducteur de ne pas en dissimuler l’existence derrière de beaux effets de style, vernis lisse, miroir qui ne renvoie que l’image de l’interprète lui-même et interdit de pénétrer jusqu’au sens. I.es traducteurs sérieux sont partis d’une décision de principe, qui est d’éviter l’anachronisme en tentant de n’expliquer le Coran qu’à partir de lui-même et de l’état de la langue arabe telle quelle était au Xème siècle. Des travaux consciencieux de ce genre sont les seuls qui méritent le nom de traductions du Coran. Mais ils infestent le texte de toutes sortes de parasites graphiques : parenthèses explicatives, points d’interrogation avouant le caractère hasardeux d’une interprétation. crochets indiquant ce que l’on a ajouté au texte pour le rendre intelligible. »
Suite : la thora et l’injil
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